Plaidoirie de la défense - affaire Kevin D.

Dans cette plaidoirie, l'avocat cherche à s'attirer la bienveillance de l'auditoire en utilisant à plusieurs reprises la concession. Les nombreux procédés d'insistance structurent sa prise de parole, notamment dans la péroraison.

Certes, son casier judiciaire ne plaide pas en sa faveur. Certes, les faits qui lui sont reprochés aujourd’hui sont graves et ont eu des conséquences sérieuses pour le jeune Michaël ici présent. On ne peut pas bien saisir la personnalité de Kevin si on ne se penche pas sur le drame qu’il a vécu voici cinq ans. Kevin, alors âgé de douze ans, doit faire face au décès de son grand frère, âgé à l’époque de quinze ans. Et que l’on regarde le dossier : vous l’avez dit vous-même, Monsieur le président : jusqu’à cet âge de douze ans, même si tout n’est pas rose à la maison, Kevin est un garçon normal, un garçon sans problèmes, comme les autres. Mais à partir de ce jour-là, sa vie bascule. Sa vie bascule parce que ce frère, qu’il aimait tant, qu’il adorait, qu’il voyait comme un modèle, n’est plus là. Et il perd l’élément stabilisateur dans sa vie. Sa famille rencontre de graves difficultés financières, son père étant au chômage et sa mère n’ayant jamais travaillé. Alors la conséquence est directe, est simple : ils n’ont pas les moyens de donner un sou d’argent de poche à Kevin. Et ce problème est récurrent chez lui. Il me l’a dit souvent lors de nos divers entretiens, avec ses propres mots : « Le problème, c’est que j’ai pas une thune. J’ai pas une thune ». Comme si tous ses problèmes antérieurs ne suffisaient pas, il n’a quasiment aucune vie sociale pour un problème financier. Alors Kevin va chercher une solution et va la trouver et, je vous l’accorde, c’est la plus stupide qui soit : il va chercher l’argent là où il se trouve. Il va chercher l’argent facile : il va racketter. Et il a racketté Michaël pendant plusieurs mois. L’ordonnance du 2 février 1945, qui fonde notre droit pénal pour les mineurs, édicte un principe fort et qu’il ne faut jamais oublier : la peine de principe pour un mineur, c’est de prononcer une mesure d’éducation, une mesure d’assistance, une mesure de surveillance, et ce quel que soit l’âge du mineur, quels que soient ses antécédents judiciaires. En tout état de cause, l’emprisonnement ne doit être envisagé qu’en dernière extrémité. Je vous demanderai de ne pas renvoyer Kevin en prison, de peut-être prononcer une peine de prison ferme, mais en tout cas qui n’excède pas le temps de détention déjà effectué, et surtout, surtout de ne pas révoquer les sursis que Kevin a au-dessus de la tête, afin qu’il puisse poursuivre ce processus de réinsertion déjà fort bien engagé. Je vous remercie.

 


Juste une petite question avant de vous laisser lire le texte 😇

Afin de proposer un contenu adapté, nous avons besoin de mieux vous connaitre.

Résumé

L'avocat commence par opérer quelques concessions, avant de mettre en avant le drame vécu par le prévenu à l'entrée dans l'adolescence. Il évoque ensuite les difficultés financières de la famille, et le choix regrettable du jeune homme pour les surmonter. L'argument finale est un argument d'autorité puisqu'il s'agit de l'évocation d'une ordonnance de 1945 consistant à toujours privilégier les mesures d'assistance au détriment des mesures coercitives.
Œuvre : Documentaire "Kevin D., 17 ans au moment des faits"
Auteur : Ministère de la Justice
Parution : 2018
Siècle : XXIe

Thèmes

racket, délinquance, justice, procès

Notions littéraires

Narration : Sans objet
Focalisation : Sans objet
Dominante : Argumentatif
Notions : concession, présent de narration, superlatif

Entrées des programmes

  • 5e - Vivre en société, participer à la société : avec autrui, familles, amis, réseaux. -> Productions issues des médias et des réseaux sociaux
  • 4e - Agir sur le monde : informer, s’informer, déformer ? - textes et documents issus de la presse et des médias
  • 3e - Vivre en société, participer à la société : dénoncer les travers de la société
  • 2nde - La littérature d’idées et la presse du XIXe siècle au XXIe siècle