MA VIE. A 11 ans, chez un buraliste chinois du 12e arrondissement, je demande à ma mère d'acheter le magazine "Okapi", qui vulgarise l'actualité pour les 10-15 ans. Ma mère trouve ça cher, mais accepte pour avoir la paix. De retour chez moi, j'oublie l'existence de ce magazine.
MON BIOPIC. A 4 ans, chez le vieux kiosquier moustachu et humaniste (interprété par André Dussolier) d'un village de montagne, je tombe en hébétude devant un exemplaire périmé du "Monde". Je me tourne vers ma mère, une paysanne corse illettrée (Adèle Exarchopoulos) et je lui dis : "Maman, je serai journaliste !" Elle me gifle. "Tu travailleras à la ferme, comme tes frères !" De rage, j'arrache le vieux journal et je m'enfuis à travers le maquis. Ma mère va pour me rattraper mais le vieux kiosquier lui pose une main chaleureuse sur l'épaule. De sa voix douce, il lui dit : "Les enfants doivent suivre le chemin de leur rêve, madame Caviglioli." Puis il meurt paisiblement dans ses bras. Dans la montagne, avec mon journal froissé, j'apprend les bases du métier.
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MA VIE. A 27 ans, après des années de stage et de CDD, la DRH du journal me convoque et m'annonce que je suis embauché. Elle me tend un carnet de tickets-restaurants et me dit de me mettre en contact avec la mutuelle. Puis je retourne à mon poste de travail. Je dois finir d'illustrer un article sur le boom immobilier dans la région bordelaise.
MON BIOPIC. J'ai 19 ans, je viens à peine de m'installer sous les combles d'un vieil immeuble de Montmartre et, un matin, je vais tenter ma chance au "Nouvel Observateur". Je suis immédiatement engagé par un rédacteur en chef bourru (François Cluzet) qui me confie illico la rubrique politique. "File à l'Elysée, trouve-nous quelque chose pour l'édition de jeudi prochain !" A l'Elysée, je rencontre une vieille briscarde du "Figaro" (Marion Cotillard). Elle me donne un tuyau : le président de la République s'apprête à modifier la Constitution afin de vendre la Corse à la Chine. Je repense à ma vieille mère, au village de mon enfance. Que deviendront-ils, sous le joug de l'armée chinoise ? Je dois empêcher ça ! Je rentre à la rédaction et, quelques minutes plus tard, le journal paraît dans tous les kiosques du pays, mon article en une.
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MA VIE. Mon chef de service aux pages culture, Jérôme Garcin, me demande des sujets d'articles légers pour les numéros d'été. J'obtempère.
MON BIOPIC. Jérôme Garcin (Pierre Niney) refuse mon enquête sur l'empoisonnement des rivières par les multinationales. A la place, il veut un sujet photo sur le retour du bikini. "Ca, ça intéresse les gens ! Tout le monde s'en fout, de tes enfants malades !"
D'un geste rageur, je pose sur son bureau des photos d'enfants empoisonnés. "Lui, c'est Timothée, dis-je, un sanglot dans la voix. Il préparait le concert de fin d'année de son école mais il ne pourra pas chanter parce qu'il est entre la vie et la mort ! Elle, c'est Charlotte. Le samedi, elle allait chez les vieilles dames de son village pour leur tenir compagnie. Aujourd'hui, les vieilles dames se demandent pourquoi elle ne vient plus." Jérôme Garcin, les larmes aux yeux, regarde les visages innocents des deux petites victimes. "OK, finit-il par dire. Je te donne toutes les pages que tu veux.Fais tomber ces salopards."