Mais pourquoi êtes-vous convaincus, chers amis binaires, que seuls les subalternes ont une identité ? Pourquoi êtes-vous convaincus que seuls les musulmans, les juifs, les pédés, les lesbiennes et les trans, les habitants de la banlieue, les migrants et les Noirs ont une identité ? Et vous, êtes-vous les normaux, les hégémoniques, les psychanalystes blancs de la bourgeoisie, les binaires, les patriarches-coloniaux, sans identité ? Il n'y a pas d'identité plus sclérosée et plus rigide que votre identité invisible. Que votre universalité républicaine. Votre identité légère et anonyme est le privilège de la norme sexuelle, raciale et de genre. Ou bien nous avons tous une identité. Ou alors, il n'y a pas d'identité. Nous occupons tous une place diverse dans un réseau complexe de relations de pouvoir. Etre marqué d'une identité signifie simplement ne pas avoir le pouvoir de nommer sa position identitaire comme étant universelle. Il n'y a pas d'universalité dans les récits psychanalytiques dont vous parlez. Les récits mythiques-psychologiques repris par Freud et élevés au rang de science par Lacan ne sont que des histoires locales, des histoires de l'esprit patriarcal-colonial européen, des histoires qui permettent de légitimer la position encore souveraine du père blanc sur tout autre corps. La psychanalyse est un ethnocentrisme qui ne reconnaît pas sa position politiquement située.